Dans les dernières décennies du 19e siècle, en plus d’un boom démographique et économique, on assiste à une transformation de la vie associative sherbrookoise avec l’apparition de sociétés à but culturel, sportif ou fraternel. Avec un nombre d’habitants en croissance, la municipalité doit aussi fournir des services afin d’assurer la sécurité et la santé sur son territoire. En 1852, un premier corps de pompiers volontaires est formé et est en constante expansion tout au long du siècle. Au courant des années 1880 plusieurs services sanitaires sont mis en place : un service d’éboueurs collecte les ordures et procède à certaines tâches de nettoyage, la ville commence à être desservie par les services d’aqueducs, d’égouts et de distribution de gaz[1].
C’est durant cette phase d’expansion des services et d’organisation urbaine que l’électrification de Sherbrooke s’opère. Avec l’arrivée de l’électricité en 1888, Sherbrooke débute une troisième phase d’industrialisation et, encore une fois, l’exploitation énergétique de la rivière en est le moteur. Désormais, les entreprises peuvent s’installer où elles le désirent et ne sont plus limitées aux emplacements situés près des sites de production d’énergie hydraulique. Ce faisant, les habitations d’ouvriers commencent à se disperser sur le territoire de la ville et l’arrivée du tramway favorise ce mouvement d’expansion urbaine.
Sur le plan politique, l’exploitation hydroélectrique donne naissance à d’âpres luttes. Durant la première décennie du 20e siècle, un débat portant sur la municipalisation du service d’hydroélectricité fait rage dans toutes les sphères de la société ainsi qu’au conseil municipal[2]. De manière générale, les anglo-protestants sont contre la municipalisation, alors que les franco-catholiques y sont favorables. De 1902 à 1908, les autorités municipales ont recours quatre fois au référendum avant de finalement prendre possession des actifs de la Sherbrooke Power, Light and Heat Company, anciennement connue sous le nom de Sherbrooke Gas and Water Company[3].
Jusqu’à la crise économique des années 1930, la ville est en pleine expansion. Cela s’accompagne de besoins énergétiques croissants suite à l’implantation de nombreuses industries qui profitent de tarifs énergétiques avantageux. Afin de soutenir son développement économique, la ville procède à la construction de deux nouvelles centrales sur la rivière Saint-François, à Weedon et à Westbury. En 1929, ces deux centrales produisent à elles seules plus de la moitié de l’énergie du Service d’électricité de Sherbrooke. Cela permet à la ville de demeurer, après Montréal, un des plus importants centres industriels au Québec[4].
Le mouvement hygiéniste, amorcé dans les dernières décennies du 19e siècle, s’y fait sentir. Au début du 20e siècle, la ville fait l’acquisition de nombreux terrains afin d’en faire des parcs et espaces verts. Plusieurs règlements sont mis en place pour encourager la plantation d’arbres sur les terrains des particuliers et la Sherbrooke City Improvement Association apparaît. Fondée en 1902, cette association cherche à sensibiliser le conseil et la population à l’hygiène, la propreté et à la mise en valeur des beautés naturelles de la ville, dont les gorges de la rivière Magog[5].
[1] Jean-Pierre Kesteman, Histoire de Sherbrooke, tome 2 : De l’âge de la vapeur à l’ère de l’électricité (1867-1896), Sherbrooke, Éditions GGC, 2001, coll. «Patrimoine», p. 167-168.
[2] Jean-Pierre Kesteman, Histoire de Sherbrooke, tome 3 : la ville électrique et du tramway (1897-1929), Sherbrooke, Éditions GGC, 2002 coll. «Patrimoine», p. 9.
[3] Ibid., p. 15
[4] Ibid., p. 51.
[5] Ibid., p. 192.